Les militants du mouvement citoyen Lutte pour le Changement (Lucha), section de Butembo au Nord-Kivu, sont descendus dans la rue ce vendredi 24 janvier 2024 pour dénoncer une fois de plus la dégradation de la situation sécuritaire dans plusieurs villages et localités de la région de Beni-Lubero.
Cette situation sécuritaire alarmante entraîne de graves conséquences humanitaires, notamment pour les civils qui fuient les exactions commises par les rebelles ougandais des Forces Démocratiques Alliées (ADF).
À travers cette manifestation publique, la Lucha a voulu rappeler au gouvernement congolais qu’au-delà de la menace des terroristes M23-AFC-RDF dans le Sud du Nord-Kivu, l’ADF sévit dans le Grand Nord-Kivu. Cette insécurité semble ne pas susciter l’intérêt du gouvernement.
Dans son mémorandum déposé entre les mains des autorités urbaines de Butembo et adressé au chef de l’État congolais, ce mouvement non partisan et non violent souligne que depuis juillet 2024, les ADF ont multiplié les attaques dans le territoire de Lubero, une zone qui était auparavant épargnée par ces violences accrues.
Les manifestants ont dénoncé les dernières attaques meurtrières attribuées aux rebelles ADF, survenues le 2 janvier 2025, qui ont causé la mort d’au moins 68 civils exécutés à la machette dans plusieurs villages du territoire de Lubero.
En dehors de ces chiffres alarmants, une trentaine de civils ont été tués par les ADF à Muhangi, à environ une centaine de kilomètres de Lubero Centre, au Nord-Kivu. Ainsi, entre le 13 et le 20 janvier 2025, un total de 113 personnes ont été tuées à Tsava-Kiseghe (43 morts), Mutumbo (25 morts), Vusaka (4 morts), Mapanga (7 morts), Kalimba (2 morts), Mulambi (11 morts), Masokoki (8 morts) et Matundu (4 morts). Parmi eux se trouvait le chef du groupement de Bulengya, tué à Mapanga alors qu’il revenait d’une mission d’itinérance. De nombreuses autres personnes ont également été blessées, et plusieurs sont portées disparues à Makoko, Masakoti et Mambangu, selon des sources proches de la chefferie des Baswagha. En tout, moins d’un mois a suffi pour faire état de 186 personnes tuées.
Au-delà des pertes en vies humaines, d’autres conséquences ont immédiatement été enregistrées ; c’est le cas des déplacements massifs des rescapés, mais aussi de la perte de biens matériels. À ce sujet, plus de cinq mille ménages de déplacés vivent sans assistance à Mangurejipa, Kambau et Njiapanda, dans le secteur de Bapere, territoire de Lubero (Nord-Kivu). Il s’agit de personnes qui avaient fui leurs villages à cause des attaques des rebelles ADF depuis juin dernier. Elles avaient tout perdu au moment de leur fuite vers le secteur des Bapere et vivent dans des conditions extrêmement difficiles, dans des familles d’accueil.
Ces déplacés souffrent notamment du manque d’eau, de médicaments et de nourriture, en plus d’être sans abri. De plus, les rescapés des tueries atroces de Muhangi, ainsi que les habitants des autres localités situées à l’ouest du groupement de Bulengya, ont commencé à vider leurs milieux pour trouver refuge à Vusamba, Musienene, Musimba, Kyambogho, Kimbulu et dans la ville de Butembo. Ici, dans les familles d’accueil, ils vivent dans des conditions très difficiles et ont un grand besoin d’une assistance humanitaire appropriée.
La Lucha recommande entre autres :
- Au président de la République : nous lançons un énième appel à la levée pure et simple de l’état de siège qui a prouvé ses limites dans la restauration de la paix dans la quasi-totalité des provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri ;
- Au gouvernement central : prendre correctement les FARDC en charge dans la diversité de leurs besoins afin que celles-ci neutralisent sans relâche tous les groupes armés, dont les ADF et leurs supplétifs avérés ou potentiels.
- Au chef d’État-major général des FARDC : alléger la tâche du général BRUNO MANDEVU en désignant un autre commandant qui pourra s’occuper soit des opérations de traque des ADF soit celles du Front Nord contre le M23. Ainsi, le général Bruno doit rester dans l’une de ces deux opérations afin d’être efficace.
- À la justice congolaise : enquêter sur les massacres odieux ayant coûté la vie à des milliers de Congolais, et particulièrement ceux vécus récemment dans le secteur des Bapere et le groupement Bulengya, deux zones inondées par les groupes armés locaux pour des motifs non élucidés.
La population endurant cette calamité est invitée à tirer toutes les conséquences qui s’imposent et à dénoncer tous les cas suspects, quelle que soit leur catégorie.
Robert Mulyami depuis Butembo